Qu’est-ce
qui justifie (ou pas) le changement d’heure ?
Dans la nuit de samedi
à dimanche, il faudra avancer ses montres : à 2 heures, il sera
déjà 3 heures. Une modification de rythme souvent décriée.
LE MONDE | 25.03.2016 Par
Alexandre Pouchard
Le refrain est connu : «
Dans la nuit de samedi à dimanche, à 2 heures, il sera 3 heures ! »
Le changement d’heure, s’il est habituel pour nous, ne l’est
pas dans la plupart des pays du monde. Destiné à économiser de
l’énergie, il est majoritairement impopulaire parmi les Français.
Pourquoi change-t-on
d’heure ?
Dimanche 26 mars, à 2
heures du matin, il faudra ajouter soixante minutes à l’heure
légale, il sera alors 3 heures. Le retour à l’heure d’hiver (–
1 heure) aura lieu le 29 octobre 2017, à 3 heures. Ce changement est
conçu pour économiser de l’énergie l’été en profitant des
périodes de jour plus longues. Ainsi, une étude de l’Agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) publiée
en 2010 (la dernière disponible sur le sujet) a montré que le
passage à l’heure d’été entraînait :
- une consommation
d’électricité plus importante le matin, avec notamment un pic à
6 heures (équivalent à 5 heures en heure d’hiver) ;
- une consommation
beaucoup moins importante le soir, notamment entre 20 heures et 21
heures (équivalent à la période entre 19 heures et 20 heures en
hiver).
Autrement dit, les foyers
paient, en moyenne, un peu plus en électricité le matin mais
économisent finalement le soir. Pour avoir un ordre d’idée, une
heure d’éclairage en moins permet d’économiser environ 10
centimes d’euros.
En 2009 (année prise en
compte par l’étude), la demande moyenne en électricité à 19
heures a ainsi été diminuée de 3,5 gigawatts (GW). Au total,
l’économie d’énergie cette année-là s’est chiffrée à 440
gigawatts heure (GWh), principalement sur l’éclairage public,
l’équivalent d’un an d’éclairage d’une ville de 800 000
habitants, comme Marseille.
Des impacts négatifs
?
Selon un sondage
OpinionWay pour Comprendre Choisir, réalisé en octobre 2015, les
Français seraient majoritairement contre cette pratique du
changement d’heure (54 %). Seul un peu moins d’un sur cinq y
seraient favorables (19 %) et un peu plus d’un sur quatre
indifférents (27 %). Ils ignorent notamment que cela leur permet des
économies (59 %) et mettent en avant un impact négatif sur « le
sommeil, l’alimentation ou l’humeur » (75 %).
Ce dernier constat est
régulièrement appuyé par des études sur l’impact du changement
d’heure. La dernière en date, publiée en septembre 2015, a été
réalisée par la Commission européenne, qui écrit que « la santé
peut être affectée par le changement de biorythme du corps, avec de
possibles troubles du sommeil et de l’humeur ». En 2008, une étude
suédoise publiée dans le New England Journal of Medicine,
s’appuyant sur des statistiques du pays entre 1987 et 2006,
constatait « une augmentation statistiquement significative du
risque de crise cardiaque » dans la semaine suivant le changement
d’heure, notamment lors du passage à l’heure d’été.
En 1997, un rapport du
Sénat assurait que « le monde médical [restait] très partagé sur
l’existence de troubles imputables à l’heure d’été » mais
que « 19 % des médecins [faisaient] état d’une augmentation de
la consommation de médicaments et singulièrement de
tranquillisants, au moment du changement d’heure, encore qu’aucune
étude scientifique ne puisse l’attribuer à ce seul facteur ».
Parmi les possibles
impacts négatifs, l’Association contre l’heure d’été double
(Ached), qui milite contre le changement d’heure, évoque également
« des augmentations des accidents de la circulation ». Elle invoque
pour cela des chiffres de… 1976 (après le rétablissement du
changement d’heure), affirmant qu’il y a eu 661 morts sur les
routes en plus entre avril et octobre qu’en 1975.
Dans son rapport publié
en septembre, la Commission européenne, qui a passé en revue
plusieurs études sur le sujet, relève des « résultats souvent
contradictoires », certains rapports « suggérant que le changement
améliore la sécurité routière » grâce à une meilleure
visibilité à certaines périodes de l’année et de la journée
(comme l’indique une étude écossaise en 2010), d’autres «
démontrant une augmentation potentielle des accidents de la route à
cause des troubles du sommeil ».
Qui applique le
changement d’heure ?
L’impact sur les
accidents de la circulation a été un des arguments en Russie pour
mettre fin au changement d’heure en 2011. Avant le vote de la loi
actant ce retour, en juillet, des députés russes ont cité des
rapports médicaux faisant état d’une augmentation des accidents
de la route le matin et affirmé que l’heure d’été permanente
créait « des problèmes de stress et de santé, en particulier pour
les populations dans le nord de la Russie, où les matinées restent
noires plus longtemps pendant les durs mois d’hiver ».
En même temps que la
Russie, d’autres pays ont cessé en 2011 de changer d’heure,
comme l’Ukraine et l’Egypte (où le changement a finalement été
réintroduit en 2014). Au total, environ 70 pays dans le monde
changent d’heure deux fois par an. Dans certains d’entre eux sous
régime fédéral, les Etats ou provinces peuvent choisir de changer
ou pas (au Canada ou en Australie, par exemple).
En Europe, le changement
d’heure est harmonisé pour l’ensemble des Etats membres de
l’Union européenne depuis 1998, afin de faciliter les
communications et les transports.
Le lien vers l'article complet des Décodeurs est ICI.
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